La discussion à propos des éoliennes et de leur position à Paros montre combien nous sommes influencés par les technologies modernes et nous oublions ce que les générations précédentes nous ont légué; car apporter les éoliennes aux Cyclades c’ est «apporter une chouette à Athènes», puisque, ce qui caractérise particulièrement les Cyclades c’ est justement les moulins à vent. Que ce soit au port ou sur les collines environnantes (par ex. auprès de Agia Anna) ou aux villages de l’ arrière-pays (par ex. à Lefkes) ou à des endroits plus éloignés exposés aux vents (par ex. au- dessus de la piste de l’ aéroport) les anciens moulins à vent restent immobiles, souvent en ruines, sans toit ni ailes ni voiles, à quelques exceptions près à Parikia, où la Municipalité a pourvu à leur réparation.
Sur d’autres îles, qui ont apparemment plus de ressources, comme Myconos, les moulins de la Chora apparaissent réparés, tandis que sur d’ autres encore, comme à la fascinante Chora d’ Amorgos, ils ressemblent plutôt à des fantômes venant d’ une autre époque. Même réparés, leur réparation est généralement superficielle. On y voit rarement un toit en paille, puisqu’ on lui préfère le métallique qui n’a pas besoin d’ entretien, les ailes sont immobilisées pour ne pas tourner et ne pas se casser, les voiles sont inexistantes ou rudimentaires, pour ne pas se déchirer. Seules exceptions peut-être le moulin du port et de Pandrossos à Parikia et celui de Stephanos Ragoussis à Agkairia, que ce dernier essaie contre et malgré tout contretemps de maintenir en vie en tant que galerie d’ art à côté de son bar-restaurant.
Ces quelques exemples de moulins réparés nous permettent cependant de nous imaginer comment serait le paysage de Paros et, plus généralement, des Cyclades, si tous ou au moins plusieurs moulins à
vent étaient réparés. Des points blancs sur les collines et les montagnes, dans ou en dehors des villages, avec leurs ailes déployées et tournant, si possible, au vent, de réels bijoux et exemples d’ une architecture et technologie traditionnelle et esthétique.
Certes, dans les périodes de «vaches maigres» que nous traversons, une telle réparation et remise en état des moulins pourrait paraître utopique, mais peut-être ne l’ est-elle pas. Tout d’ abord parce que les moulins pourraient être associés à une logique économique. Comme Mr Stephanos et le bar de Pandrossos nous enseignent, les moulins peuvent servir de galeries d’ art ou de café, et, pourquoi pas, retrouver leur fonction initiale, celle de moudre les grains de céréales (blé ou orge) pour produire de la farine traditionnelle utilisable par les boulangeries ou la brasserie locale. En outre, afin de les combiner à la problématique actuelle, est-ce que nos polytechniciens ne pourraient pas associer la nouvelle technologie des éoliennes aux anciens moulins, afin qu’ ils acquièrent aussi une fonction moderne, en «camouflant» en d’ autres termes la nouvelle technologie dans leur coquille, avec les adaptations techniques nécessaires? Même si, en raison des différentes dimensions et contraintes résultant de l’ architecture traditionnelle, leur performance ne saurait être comparée à celle des éoliennes modernes, leurs ailes (et voiles à base de matériaux résistants) pourrait être déployées, ne fût-ce qu’ accessoirement ou à titre subsidiaire pour appuyer l’ autonomisation des îles en énergie, en donnant une nouvelle vie à ces belles constructions.
Indépendamment de l’ usage spécifique auquel les moulins pourraient être destinés, cela vaudrait la peine de les intégrer dans un des programmes régionaux financés par l’ Union Européenne. Une des mesures financées par le Fonds Européen de Développement Rural s’ intitule «services de base et le renouvellement des villages dans les régions rurales» et peut comprendre des investissements pour de petites infrastructures (y compris pour les énergies renouvelables), des services de base pour la population rurale, y compris pour les loisirs, la culture et le tourisme, ainsi que des études et investissements relatifs au maintien, à la réparation et la réhabilitation de l’ héritage culturel des villages, des paysages ruraux et de leurs aspects socio-économiques et des investissements pour la transformation de bâtiments ou autres installations dans ou près des village visant à améliorer la qualité de vie.
1 V. art. 20 du Règlement 1305/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17.12.2013 (JO L 347, p. 487 s.).
2 L’article reflète des opinions personnelles de son
Il résulte de la description des investissements éligibles qu’ il y aurait des possibilités de faire financer par l’ Union Européenne la réparation et mise en valeur des moulins à vent, et cela de plusieurs manières. Si cela n’ a pas été fait à présent, il s’ agit peut-être d’ une omission des autorités compétentes pour l’ établissement des programmes de développement rural. Il serait souhaitable que les autorités régionales responsables pour les Cyclades et, plus généralement, pour la Mer Egée du Sud, insèrent explicitement à la première occasion les moulins à vent au programme de développement rural y afférent et, surtout, sensibilisent les Municipalités et les particuliers qui disposent de moulins à vent pour qu’ ils fassent les démarches nécessaires et profitent effectivement du financement, afin de ressusciter les moulins et de faire tourner leurs ailes à nouveau, en donnant du mouvement aux collines et aux montagnes des Cyclades.
En espérant qu’ en s’ adressant ainsi à la bureaucratie nous n’ aurons pas le sort de Don Quichote qui s’ en est pris aux moulins et en souhaitant que dans quelques années la chanson (française) qui signale au meunier qui dort que son moulin va trop vite redevienne réalité…
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